Chihiro Onitsuka cherche sa voi(e/x)

Sorti fin octobre dernier, le nouvel album de Chihiro Onitsuka n’a pas franchement brillé au top Oricon, où son honnête 10ème place cache la misère avec à peine plus de 14.000 exemplaires écoulés, soit moitié moins que la première semaine de LAS VEGAS, son opus précédent qui avait déjà réalisé des scores décevants. Pourtant bien plus que son prédécesseur, DOROTHY est l’album du renouveau pour une artiste qui a plus fait parler d’elle ces dernières années pour ses problèmes de santé et sa détresse psychologique  que pour ses performances artistiques.

Chihiro Onitsuka - DOROTHY

Un mot rapidement sur l’allégorie du Magicien d’Oz : la petite Dorothy emportée dans une tornade avec sa maison enchaîne les rencontres qui lui donnent des conseils pour retourner chez elle, avec toujours des tas de péripéties à la clé. Il s’avère toutefois que ces aventures étaient totalement dispensables puisque la petite fille avait en sa possession dès le début de l’histoire l’item qui allait lui permettre de retrouver son chemin toute seule comme une grande… Effectivement, il y a un peu de ça, puisqu’après un changement de maisons de disques effectué dans la douleur, une tentative de suicide, une dépression fortement médiatisée, le harcèlement d’un fan un peu trop zélé, et surtout différents problèmes de santé qui ont fortement entamé son formidable potentiel vocal, Chihiro lutte aujourd’hui envers et contre tous, à commencer par sa propre personnalité tourmentée aux tendances auto-destructrices, pour retrouver sa voix et un semblant de paix intérieur. Les intentions sont claires, et se concrétisent sur le CD : alors que LAS VEGAS était composé de titres réalisés avant et pendant son retrait de la vie publique, DOROTHY présente pour la première fois les travaux d’une Chihiro post-apocalyptique, en pleine reconstruction. Exit Takeshi Kobayashi, le producteur qui l’a remise sur les rails : Chihiro prend pour la première fois le contrôle de sa carrière et varie un peu plus son staff. Le résultat c’est effectivement un album un peu plus varié, bien que se reposant toujours sur les poncives ballades qui ont fait le succès de la chanteuse.

Les principales ballades étaient d’ailleurs déjà connues : Hotaru, Kaerimichi wo nakushite, Kagerou et Last Melody ont déjà fait leur chemin en single, toute avec le même verdict : l’engagement et la conviction dans l’interprétation sont là, la qualité des arrangements aussi, l’efficacité des compositions est honnête quoi qu’un peu bateau, et tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes si les chansons étaient chantées un ton au dessus et avec un peu plus de puissance, là où le résultat actuel reste un poil frustrant. N’empêche, même côté chant il y a du mieux. La meilleure surprise est venue de X, single à l’esprit plus rock auquel le caractère sombre de la chanteuse confère une certaine crédibilité, et dont l’orchestration et le mixage sur cette version album tiennent du travail d’orfèvre : mention spéciale à l’utilisation parcimonieuse à forte valeur ajoutée des cordes. D’une manière générale, chapeau à Universal pour avoir offert à Chihiro des moyens techniques globalement excellents, avec une vraie orchestration pop-rock acoustique de toute beauté qui change des instruments synthétiques passés au rouleau compresseur qu’on peut entendre chez Sony.

Si les quelques pistes totalement inédites de l’album s’avèrent un peu plus passe-partout, coup de coeur quand même pour le décalé STEEL THIS HEART, un morceau pop-rock vocodé où Chihiro  dépoussière avec brio l’esprit Jpop du début des années 90 : c’est Nanase Aikawa qui devrait en prendre de la graine, elle dont le dernier album intitulé REBORN n’a pas fait renaître grand chose. Son côté kitsch criard mis à part, le clip du titre fait aussi plaisir à voir : on y trouve pour la première fois depuis longtemps une Chihiro souriante, et qui a réellement l’air de s’amuser ! Restent tout de même quelques ratés, en particulier la version Liebig de I Pass By à l’anglais épouvantable qu’on croirait chanté par une vieille édentée la bouche pleine d’anxiolitiques… Avoue Van, t’as kiffé !

Globalement, un bon album dans l’absolu, à considérer comme tel plutôt qu’avec l’espoir désormais vain d’y trouver un monument digne d‘Infection et autres Gekkou, dont l’absence frustrera sans doute les fans qui ne sont toujours pas prêts à en faire le deuil.

Album disponible sur Yesasia

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