Critique single : HALLOWEEN JUNKY ORCHESTRA – HALLOWEEN PARTY

Dans quelques jours, nous serons le 31 octobre. Comme chaque année à la même date, vous aurez oublié que ce n’est pas un jour comme les autres. Au retour d’une dure journée de travail, vous n’aspirerez, comme d’habitude, qu’à une chose : vous reposer. Certains d’entre-vous iront tout droit rejoindre la douillette chaleur de leur couette, réconfort salvateur s’il en est alors que le Grand Froid s’installe prématurément sur la France. D’autres se vautreront lamentablement dans leur canapé KNISLINGE et débrancheront leur cerveau pour quelques minutes avec la complicité bienveillante d’un épisode de Plus Belle La Vie. D’autres enfin iront plutôt chercher le défoulement dans une joyeuse partie de jambes en l’air avec leur moitié, leur amant(e), leur(s) voisin(e)(s), voire tout ce beau monde en même temps (il faut ce qu’il faut). Mais quelle que soit l’occupation choisie, vous n’y couperez pas. Au moment critique, alors que vous commencerez à goûter à la volupté du sommeil profond, alors que Ninon Chaumette sera sur le point de découvrir que sa mère n’est autre que Charles Frémont, alors que, le slip sur les chevilles, vous sentirez l’extase monter en vous telle l’écume festive d’une bouteille de jus de citrouille fraîchement débouchée… alors, alors… on sonnera à votre porte. Que dis-je : on carillonnera, on tambourinera, on s’égosillera à votre porte, sans relâche, jusqu’à ce que vous daigniez vous lever et ouvrir. A travers l’oeilleton, vous apercevrez cette horde d’infâmes lardons, qui n’ont pas compris qu’ils n’ont pas besoin d’un quelconque accoutrement pour vous terroriser de leur abominable laideur. Ces sales mioches vous honoreront de leur visite annuelle sponsorisée par les multinationales de la confiserie avec la bénédiction totale de leurs parents, bien trop contents que leurs rejetons aillent faire chier quelqu’un d’autre, pour une fois. Et oui, tremblez mes amis : c’est Halloween ! Et la seule bonne nouvelle dans l’histoire, c’est que c’est la fête préférée de HYDE, qui pour l’occasion a décidé de monter un projet sur mesure pour divertir aussi, un peu, les victimes de la société de consommation que nous sommes tous, ce jour là plus que tout autre.


L’attrait un peu puéril du chanteur de L’Arc~en~Ciel et VAMPS pour les atmosphères horrifiques n’est un secret pour personne, il est même à l’origine de la formation de VAMPS. Depuis de nombreuses années, HYDE organise pour Halloween une série de concerts thématiques, s’entourant pour l’occasion d’une bande de potes dont l’univers tourne lui aussi plus ou moins autour d’ambiances vaguement gothiques sur les bords. Cette année, les ambitions de l’artiste semblent être montées d’un cran : il a ainsi décidé de donner à sa petite sauterie annuelle une chanson-thème, et histoire de s’amuser un peu il a convié une salve de confrères et consoeurs pour donner naissance à un projet collaboratif. C’est ainsi qu’est né l’HALLOWEEN JUNKY ORCHESTRA, qui regroupe entre autres HYDE et son compère K.A.Z de VAMPS, mais aussi Acid Black Cherry, Tomoko Kawase (Tommy february6/heavenly6), Daigo (BREAKERZ), Anna Tsuchiya, RINA (SCANDAL), Kanon Wakeshima et une brochette de musiciens issus d’une sélection de cheptels Visual Kei. Rassurez-vous, HYDE n’a pas poussé le vice jusqu’à embaucher HITT : il y a des choses qui restent bien trop flippantes pour une sortie destinée au grand public !

Tout ce petit monde nous livre donc un single intitulé HALLOWEEN PARTY, qui comme on pouvait s’y attendre est un pur condensé de poncifs avec un seul véritable mérite, mais quel mérite : celui d’être particulièrement bien fichu. Pour donner le ton, la chanson nous offre déjà près d’une minute trente d’intro qui reprend tous les clichés musicaux du genre, dans la droite lignée des BO des films de Tim Burton et autres thèmes de la famille Addams. Et c’est sur un air de marche burlesque entonnée par une fanfare (édulcorée par le rouleau compresseur Sony, mais passons) que la bande de grands gamins dégobille comme un seul homme ses LALALA qui se gravent instantanément au fer rouge dans votre tête pour ne plus en sortir. Très réussi, ce refrain collégial laisse un peu plus de place aux individualités sur les couplets, mais c’est surtout la densité des arrangements et le semblant de marge de manoeuvre laissée à la composition qui surprennent pour un produit à vocation aussi commerciale.

La principale raison de cette densité réside dans la conception même du produit : HALLOWEEN PARTY n’est pas à voir comme une simple chanson; c’est le clip du titre, construit comme un court-métrage, qui est au fondement réel du projet. Le single est en fait la bande-son de la vidéo promotionnelle de HALLOWEEN PARTY, conservée dans son intégralité intro et innombrables effets et bruitages inclus. Le souci du détail perçu à l’écoute du single est décuplé au visionnage de la vidéo, petit bijou d’exercice de style à l’atmosphère visuelle très travaillée. Les décors sont soignés (mention spéciale aux foisonnantes scènes de banquet), et que dire du maquillage et des costumes (thumbs up pour Anna Tsuchiya, terrifiante) qui ont demandé un boulot gigantesque. Le tout est servi par ce qui est sans doute l’un des meilleurs traitements photographiques jamais vus sur un clip nippon, et des effets spéciaux discrets mais très bien intégrés, avec un respect extrêmement pointilleux des codes graphiques du genre. Bref, ils ont mis les moyens, mais le résultat est à la hauteur et constitue sans aucun doute l’un des meilleurs clips de l’année !

HYDE et sa petite bande nous offrent donc une réalisation tout, mais alors tout sauf originale, prévisible au plus haut point, mais tellement, tellement bien exécutée que l’on peut considérer le contrat comme pleinement rempli. Ce n’est certes pas le genre de succès à même de révolutionner le paysage musical nippon. Mais dans un marché très friand de chansons thématiques et saisonnières, cet HALLOWEEN PARTY a absolument tout pour devenir un grand classique de la période d’Halloween. Bien plus en tout cas que les dernières élucubrations de Tommy february6 / Tommy heavenly6 (je le dis là vite fait pour m’économiser une chronique sans intérêt sur un CD sans intérêt. Ca c’est fait !). Il fut un temps où ce genre de projets collaboratifs était devenu une des composantes nourricières du marché japonais, et on ne s’en plaignait pas. HALLOWEEN PARTY nous rappelle cette époque bénie qui n’a malheureusement pas duré bien longtemps… Pourvu que cela donne des idées à d’autres !

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